Ecrire aux temps du Corona (jour 20)- L’héritage de Pépé Gus
Une jolie photo aujourd’hui, toujours extraite du site Bricabook.
Bonne lecture !!
A soixante-et-un ans, Gustave prit sa retraite. Gustave, c’était mon grand-père. Oncle Gus pour certains, pépé Gus pour moi, sa petite fille unique. Pendant plus de quarante ans, il avait été menuisier ébéniste. Quarante années au service du bois. Il en avait gardé une grande cicatrice sur le bras gauche et un doigt en moins. Une distraction, un tour à bois, et hop… ça ne pardonne pas ces trucs-là !
Cette même année, à la fin du repas de Pâques, papa et maman annoncèrent deux nouvelles au moment du dessert.
« Une bonne et une moins bonne, avertit maman.
— Commence par la bonne ! exigea Pépé Gus. Ce sera toujours ça de gagné.
— Richard et moi allons être parents, comme vous !
— Enfin, vous y êtes arrivés, jubila Josette, ma grand-mère.
— Oui, dit papa, mais ces essais nombreux et médicalisés ont pour conséquence la mauvaise nouvelle que Karine va vous annoncer.
— Nous n’aurons pas d’autres enfants. Ce bébé qui va venir sera votre seul petit-enfant !
— Et ce sera le plus beau, tonna Pépé Gus en levant son verre.
— Ou la plus belle, corrigea ma grand-mère !
— Évidemment ! A la vôtre ! »
Et quelques mois plus tard, j’arrivais.
La plus belle, comme l’avaient prédit mes grands-parents.
A petite fille unique, soin unique.
A partir du jour de ma naissance, Pépé Gus se mit au travail, dans le plus grand secret. Même mémé ne savait pas ce qu’il tramait. Tous les jours, pendant une heure, il s’enfermait dans son atelier, sans rien dire. Une heure, pas plus. Mais pendant presque trois ans.
« Je travaille pour le Père Noël » disait-il quand maman essayait de le faire parler.
Tout le monde se doutait qu’il y avait un secret là-dessous.
Et puis, le jour de mes quatre ans, après avoir soufflé mes bougies, je vis Pépé Gus arriver avec une grande boite en bois vernie. Pas de papier cadeau, il n’avait jamais emballé quoique ce soit ! Il posa la grande boite devant moi.
« Tiens, ma princesse, annonça-t-il. Bon anniversaire ! »
Et il retourna s’asseoir au bout de sa table en faisant semblant de se désintéresser de ce qu’il venait de poser. Par contre, toute la famille avait les yeux fixés sur la fameuse boite.
Je l’ouvris.
Elle contenait un service à thé complet : six tasses, six soucoupes, six assiettes à gâteau, trois théières de différentes tailles, un pot à lait, un sucrier et six minuscules petites cuillères. Et la boîte, avec des rangements intérieurs.
En bois.
Il avait passé plus de mille heures, caché dans son appentis à confectionner à la main ce service que j’ai toujours.
J’ai joué avec pendant toute mon enfance. Une dinette de riche, disait papa.
Ce matin, ma fille m’a téléphoné.
« Maman, pouvez-vous passer, papa et toi, prendre le thé vers quatre heures ? On a une surprise à vous annoncer ! »
J’ai ressorti le service à thé. Je pense que l’héritage de Pépé Gus va changer de mains aujourd’hui !
Voilà…. A chaque jour suffit sa peine.
Commentez si vous voulez.
Portez-vous bien.
Prenez soin de vous.
Et des autres.
A demain.
2 Comments
Le Dû Loïc
Jolie histoire. Quelle imagination !
Dominique
Très émouvant, cette transmission de génération en génération.